Question parlementaire Culture sur le poids du secteur culturel en FWB – 05 11 2019
Question de M. Charles Gardier à Mme Bénédicte Linard, ministre de la Petite Enfance, de la Culture, des Médias, de la Santé et des Droits des femmes, intitulée «Étude concernant le poids du secteur culturel en Fédération Wallonie-Bruxelles»
M. Charles Gardier (MR). – Madame la Ministre, au début de la législature précédente, j’avais interpellé votre prédécesseure concernant l’élaboration du budget de la culture. Nous avons en effet trop souvent tendance à envisager le secteur culturel sous l’angle de ce qu’il coûte et non de ce qu’il rapporte. À l’époque, mon interpellation avait pour objectif principal de réclamer la réalisation d’une étude à l’échelle de la Fédération Wallonie-Bruxelles, afin de démontrer l’ampleur des retombées économiques de la culture. En 2015, à l’occasion du cinquième anniversaire du Fonds St’art, la Région wallonne et la Fédération Wallonie-Bruxelles avaient commandé à l’Institut wallon de l’évaluation, de la prospective et de la statistique (IWEPS) et à l’Université libre de Bruxelles (ULB) une étude visant à mesurer le poids du secteur culturel. Cette étude a constitué une réelle avancée. Hors secteur public, le secteur culturel est le troisième employeur au sein de l’Union européenne, derrière les secteurs de la construction et de l’HORECA. Il représente en effet 7,1 millions de travailleurs et pèse 536 milliards d’euros en Europe. En Belgique, le secteur génère 48 milliards d’euros de chiffre d’affaires et fournit plus de 100 000 emplois en Fédération Wallonie-Bruxelles. En ce début de nouvelle législature, cette problématique est toujours bien présente. Il semble toujours difficile de consacrer de l’argent au secteur culturel, en dépit du fait qu’un euro investi en ramène trois, quatre ou cinq, les chiffres variant d’un dossier à l’autre.
Madame la Ministre, disposez-vous de chiffres actualisés depuis 2015? Tiendrez-vous compte de l’étude de 2015 dans le cadre de l’élaboration de vos politiques? Les chiffres de cette étude auront-ils un impact sur la confection du prochain budget?
Réponse de la Ministre
Mme Bénédicte Linard, vice-présidente du gouvernement et ministre de l’Enfance, de la Santé, de la Culture, des Médias et des Droits des femmes. – L’élaboration de comptes satellites pour la culture, qui permettent d’étudier et de corréler l’impact des dépenses publiques sur l’économie, est une réalité qui prend de l’ampleur en Europe. De plus en plus de ministères de la Culture ont adopté cette approche et mettent à disposition des données, régulièrement mises à jour, mesurant l’impact de la culture sur l’économie. C’est le cas aux Pays-Bas, en Espagne et en France par exemple. En Belgique, il n’existe pas encore d’étude de ce genre, ni à l’échelon national ni à l’échelon d’une Communauté. En 2018, l’Université Saint-Louis a toutefois réalisé une étude consacrée à la valeur ajoutée, au chiffre d’affaires et à l’emploi générés par l’économie culturelle et créative dans la Région de Bruxelles-Capitale, tout en comparant les résultats avec la Région wallonne et la Région flamande. Mon administration a prévu de s’entretenir avec l’équipe qui a réalisé cette étude, afin de mieux connaître les principes et méthodes qui la sous-tendent et d’envisager une éventuelle appropriation ou un élargissement à la Fédération Wallonie-Bruxelles. La réalisation d’une telle étude est particulièrement délicate sur le plan méthodologique, tant les questions d’approche, de sources et de périmètre qui se posent sont nombreuses. L’étude de l’IWEPS et de l’ULB, évoquée dans la question, à laquelle l’Observatoire des politiques culturelles (OPC) de la Fédération Wallonie-Bruxelles a très partiellement collaboré, a reçu un accueil parfois très critique en raison de certains choix méthodologiques. Mes services estiment qu’il est nécessaire de trouver des réponses satisfaisantes à un certain nombre de questions structurantes ou de les clarifier préalablement au lancement de toute étude. Le point de départ est de définir la notion de culture. Qu’englobe-t-elle et que n’englobe-t-elle pas? Par exemple, à partir de quand l’activité économique d’un restaurant attaché à un musée doit-elle être intégrée aux indicateurs culturels? Quel angle d’approche adopter pour mesurer cette activité économique? Les résultats ne seront pas les mêmes selon que l’on adopte une approche basée sur l’industrie ou sur les produits et services. La seconde hypothèse aurait pour avantage de prendre en compte l’éducation, ce qui est important au regard de la politique culturelle de la Fédération Wallonie-Bruxelles. D’autres questions se poseront encore quant à la mesure de l’impact de l’économie numérique ou quant à la définition et l’usage non stabilisé des codes économiques européens NACE, sur lesquels s’appuie la collecte des données. Monsieur le Député, vous voyez à quel point la question que vous soulevez est complexe, d’autant que la Fédération Wallonie-Bruxelles n’est pas la seule entité compétente pour répondre à toutes ces questions. L’étude devra réunir les différents niveaux de pouvoir afin d’accéder aux données de la comptabilité nationale (Bureau fédéral du Plan, Statbel, IWEPS, etc.) et de les traiter. De même, le milieu académique et les partenaires européens (les différents États membres de l’Union européenne, Eurostat, etc.) disposent d’une expertise qu’il faut pouvoir solliciter. Je ne manquerai pas de motiver mes équipes. Par ailleurs, mon administration travaille à l’identification des flux financiers de la culture. Le programme informatique DICOS, qui devrait être pleinement opérationnel d’ici deux ans, permettra d’agréger les données économiques des opérateurs culturels soutenus par la Fédération Wallonie-Bruxelles. Ces données, ainsi que leur croisement avec celles issues du cadastre de l’emploi souhaité dans la Déclaration de politique communautaire (DPC), permettront, je l’espère, d’améliorer la connaissance des impacts de la culture sur l’économie et d’éclairer les réflexions portant sur les évolutions et les choix de la politique culturelle.
Réplique
M. Charles Gardier (MR). – Tout cela est effectivement complexe, mais, en réalité, lorsque l’on parle de culture, on parle d’épanouissement des personnes, de création de liens et de bien-être. C’est le point le plus important. Si l’on parvient en plus à démontrer que tout euro investi en rapporte davantage, il reste très peu de raisons de ne pas investir de façon plus massive dans la culture, comme le font d’ailleurs certaines régions. Un certain nombre d’études réalisées un petit peu partout en Europe le démontrent. Nous devons en prendre conscience. Je voudrais vraiment que des chiffres permettant d’objectiver cette réalité et de nous donner une raison supplémentaire d’investir massivement dans la culture soient disponibles au plus vite.