Question orale sur la rémunération des artistes plasticiens

Par Charles Gardier

Question ouverte de GARDIER Charles à LINARD Bénédicte, vice-présidente du gouvernement et ministre de l’Enfance, de la Santé, de la Culture, des Médias et des Droits des femmes, sur la rémunération des artistes plasticiens.

Madame la Ministre, je vous interroge sur la rémunération des artistes plasticiens, sujet qui avait déjà été abordé par M. Dispa lors de la réunion du 29 mars dernier de notre commission.

Depuis sa création il y a deux ans, la Fédération des arts plastiques (FAP) travaille à la mise au point d’une charte des bonnes pratiques et d’une grille de rémunération minimale, laquelle règlera la partie financière des relations entre l’artiste et le lieu d’exposition. Cette grille de lecture est par ailleurs disponible sur le site internet de la FAP.

J’entends et salue naturellement les efforts que vous avez déployés à l’égard des artistes plasticiens depuis le début de la pandémie de Covid-19. Je me fais toutefois le relais de leurs préoccupations au sujet du périmètre du futur statut de l’artiste, car les artistes plasticiens souffrent notamment de l’absence de rémunération structurelle lors de la monstration de leur travail. Il est en outre important que chaque discipline culturelle puisse se redéployer à pleine mesure du talent de ses artistes, qu’ils soient fortement médiatisés ou non. Madame la Ministre, avez-vous pris connaissance de la grille de rémunération minimale pour les artistes plasticiens composée par la FAP? Quel regard portez-vous sur cette grille? Envisagez-vous de prendre des initiatives afin de répondre à la demande de la FAP? Dans l’affirmative, lesquelles? Que ressort-il de la concertation au sein de la Chambre de concertation des arts plastiques à ce sujet?

Réponse de la Ministre

Mon cabinet était présent lors des auditions du secteur culturel et il a entendu les re- vendications de la FAP. D’ailleurs, les services du gouvernement et mes collaborateurs entretiennent la concertation avec le secteur. Une nouvelle rencontre a d’ailleurs été organisée le 12 avril dernier entre mon cabinet et les représentants de la FAP afin d’aborder les nouvelles propositions. À cette occasion, il a été décidé que la charte et la grille de rémunération élaborées par la FAP seront présentées à la Chambre de concertation des arts plastiques dans les meilleurs délais. Pour ce faire, un représentant de la FAP sera invité en tant qu’expert extérieur afin d’expliciter le travail accompli.

Il convient en effet de fixer un cadre de référence qui permettra tant aux artistes qu’aux opérateurs subventionnés de travailler dans un contexte adapté et transparent. La Chambre de concertation des arts plastiques a déjà expliqué l’importance d’instaurer une directive similaire à celle imaginée par la Flandre, tout en prenant en compte les différences communautaires entre les secteurs francophone et flamand. En Flandre, la directive n’est pas contraignante, mais elle ouvre le dialogue entre les partenaires et encadre les bonnes pratiques. La Chambre de concertation des arts plastiques doit donc prendre en considération la spécificité de la Fédération Wallonie-Bruxelles lorsqu’elle analysera cette grille.

Dans le même temps, l’administration poursuit la rédaction d’un cadre référentiel et de recommandations destinés au secteur des arts visuels en Fédération Wallonie-Bruxelles. Elle mène ce travail en bonne collaboration avec la FAP: tant le modèle de rémunération flamand que le modèle défendu par la FAP servent d’outils de travail pour la création de ce cadre.

Ce dernier devra être praticable pour les opérateurs subventionnés qui s’investissent dans le champ des arts plastiques ainsi que pour les artistes et accompagnants. Il devra s’inscrire dans le futur écosystème qui est en train de naître avec l’adoption d’un nouveau statut de l’artiste par le pouvoir fédéral. Par ailleurs, il s’agira également de s’inspirer des pratiques de rémunération déjà mises en œuvre par certains des opérateurs du secteur. Ces travaux devraient aboutir avant la fin de l’année 2022.

Je tiens néanmoins à rappeler ici qu’il m’est impossible de rattraper l’absence de financement du secteur depuis quelques années et durant les législatures précédentes. Cette absence de financement a fait des arts plastiques le «parent pauvre» de la culture. Une rémunération juste aux artistes plasticiens et métiers connexes demanderait une revalorisation importante de l’enveloppe actuelle dédiée aux arts plastiques. Pour rappel, cette enveloppe est inférieure à sept millions d’euros, dont deux sont alloués au Musée des arts contemporains (MAC’s).

Depuis mon entrée en fonction, je ne suis cependant pas restée inactive. D’abord, j’ai permis à la FAP de se structurer grâce à un soutien de 50 000 euros que je lui accorde pour ce faire. Ensuite, je lancerai prochainement un appel restreint aux nouvelles fédérations afin que la carence avérée au sein de la Chambre de concertation des arts plastiques soit comblée et que la FAP soit reconnue comme fédération représentative du secteur. Ces derniers mois, j’ai revalorisé plusieurs types de soutien, dont les aides à la création, et ce, pour tous les domaines des arts visuels, à savoir les arts plastiques, les arts numériques, le design et la mode. J’ai également élargi les aides à la diffusion au secteur des arts visuels, ce qui donnera un nouvel élan à la relation entre les plasticiens et les publics et ce qui contribuera également à une meilleure rémunération des artistes, curateurs et médiateurs.

En outre, je travaille actuellement à l’élaboration d’un arrêté d’application du décret du 3 avril 2014 relatif au secteur des arts plastiques. En effet, il n’existe pas encore d’arrêté à l’heure actuelle. Un tel arrêté d’application pourra être un prétexte de choix pour aborder, en concertation avec le secteur, les opérateurs et la Chambre de concertation des arts plastiques, les critères de rémunération dans les institutions subventionnées. Cette concertation sera également le lieu pour débuter la réflexion sur un contrat de filière en arts plastiques qui, comme vous l’avez souligné, Monsieur Segers, figure dans la DPC.

Je conclurai en disant que mon passage à la foire Art Brussels fut extrêmement gratifiant. J’ai rencontré l’artiste plasticien Valérian Goalec et la commissaire d’exposition, Maud Salembier: ils interrogeaient le rapport des objets à leur place dans le quotidien avec une intuition très sobre et en totale adéquation avec le stand qui leur était réservé. Une foire de ce type est un moyen extrêmement im- portant pour le lancement de carrière des jeunes artistes. C’est pourquoi la Fédération Wallonie-Bruxelles continuera à y soutenir la participation de ses artistes. J’ai d’ailleurs prévu de renouveler la présence de la Fédération à Art Antwerp pour la deuxième édition en 2022, au vu de la retombée positive qu’a eue l’édition de 2021.

Réplique

Les arts plastiques ont longtemps été mis de côté et vus comme le parent pauvre de la culture. Heureusement, c’est en train de changer. Je vous remercie, Madame la Ministre, d’y être attentive et d’y travailler. Vous êtes à l’écoute du secteur pour lui donner un cadre de référence et un contrat de filière. La Fédération Wallonie-Bruxelles regorge de talents dans ce domaine. Ces premiers pas ont toute leur importance et en appellent beaucoup d’autres.